Lionel Vatinet ou la recette du succès.

JPEG - 46.4 kb
Photo by Tamara Lackey

Il y a quelque chose de magique dans une miche de pain artisanale. Peut-être est-ce son aspect doré. Peut-être est-ce son cœur souple et aéré. Peut-être est-ce ce goût rustique et divin à la fois ? En tout cas, il est évident que Lionel Vatinet a découvert sa recette du succès.

Contrairement à beaucoup de boulangers, Lionel Vatinet n’est pas né dans un pétrin, la vocation n’est apparue que plus tard dans sa vie. Ses parents se sont tôt aperçus qu’il n’était pas disposé à de longues études, préférant la pratique à la théorie. Aussi, ils ont profité que la clientèle de leur bar-tabac de la Rochelle était composée essentiellement d’artisans pour inciter leur fils à les observer et passer du temps avec eux afin de découvrir sa vocation. Vatinet s’est alors essayé à la plomberie, l’électricité et la boulange. C’est finalement cette dernière qui a suscité son intérêt. Inspiré par l’exemple de son grand frère qui avait rejoint le mouvement des Compagnons du Devoir pour devenir chef, Vatinet a saisi l’opportunité de voyager avec les compagnons et devenir un apprenti. Âgé de 17 ans, il est allé à Tours pour commencer sa septième année d’apprentissage qui l’a conduit à voyager dans toute la France, suivant les différentes étapes du programme, jusqu’à Bordeaux où il a obtenu le titre de Maître boulanger.

Son appétit de voir le monde et de partager son amour pour la fabrication de pain a conduit Vatinet à s’installer en Martinique puis à Londres. Finalement, il s’est installé aux États-Unis après avoir répondu à une annonce pour un poste à Washington DC. Bien que n’ayant jamais rêvé de vivre en Amérique, cela fait maintenant vingt et un ans qu’il est arrivé pour « voir simplement ce qui s’y passe ».

Après six mois à Washington DC, son ami et mentor Michel Suas lui a donné un précieux conseil : « si tu veux faire du consulting, va là où sont les besoins. »

Ce conseil en tête, Vatinet a commencé à offrir ses services de boulanger-consultant à différentes boulangeries du pays.
_ « C’est une passion pour moi que d’aider les gens à découvrir leur passion » explique Vatinet. « Si je peux amener les gens à comprendre dès le début… comme disait Joseph Joubert : « Enseigner, c’est apprendre deux fois. » C’est ce que je ressens et cela me passionne. »

D’une fameuse boulangerie de Fresno à un comptoir de la tribu Hopi, en passant par des boulangeries naissantes de Vancouver, Ft. Collins et même Atlanta, Vatinet voyage dans toute l’Amérique du Nord, partageant son savoir et son expertise dans une niche économique en plein essor.

« J’aime que les gens ont tellement envie de bien faire. [Les Américains] ont un esprit compétitif, et ils s’y mettent… » En effet, une des plus grande réussite de Vatinet est la victoire sans précédent de l’équipe américaine qu’il coachait lors de La Coupe du Monde 1999 de la Boulangerie en France.

JPEG En 1995, Vatinet a rejoint son ami Suas pour devenir un des formateurs et fondateurs du San Francisco Baking Institute, premier établissement du genre aux USA. Il y est resté plus de deux ans à aider l’institut à se développer et à enseigner des boulangers venus des boulangeries les plus respectées du pays telles que La Brea, Acme, ou Panera.

C’est au salon de la boulangerie de Chicago que Lionel Vatinet a rencontré son alter ego, Missy. Cette entrepreneuse au sens des affaires tout américain était occupée à déguster différentes sortes de pains avec son groupe. Vatinet lui a rendu ensuite visite à Richmond où il est tombé amoureux.

« N’as-tu pas envie de t’installer quelque part ? »

Cette simple question a éveillé chez Vatinet le désir de créer sa propre affaire.

Ensemble, ils ont commencé à étudier où ils pourraient ouvrir une boulangerie. Leur intérêt s’est alors porté sur la région autour de Raleigh. Pendant que Vatinet se trouvait au Liban pour son travail, ils ont déniché l’endroit parfait à Cary, Caroline du Nord, centralisé, cosmopolite, idéal pour élever une famille, proche de la mer. La boulangerie a ouvert ses portes en octobre 1999.

Au début de l’aventure, le couple s’est demandé si le Sud était prêt pour le pain artisanal, mais au bout du compte, ce qui importe réellement c’est d’éduquer le public, une dégustation à la fois. Depuis quatorze ans, La Farm Bakery propose de délicieuses merveilles de l’art ancestral de la fabrication de pain. Devenue une véritable affaire de famille, Missy, aujourd’hui son épouse, gère l’entreprise pendant que Vatinet commande la fabrication de plus de 15 sortes de pains, sans mentionner les vingt sélections de la saison. De plus, les parents de ces deux entrepreneurs viennent en aide à leurs enfants en travaillant dans la boulangerie mais aussi au café, ouvert 4 ans plus tôt. Une ancienne employée, maintenant à la retraite, est devenue la grand-mère de cœur et baby-sitter de leurs deux filles, âgées de 3 et 4 ans. Son entreprise florissante, Vatinet se réjouit également de compter la communauté française parmi sa clientèle.

Bien qu’il ne voyage plus autant, il continue de transmettre ses connaissances en enseignant quatre jours par semaine. Inspiré par sa femme, Vatinet a écrit à l’attention des amoureux du pain qui ne peuvent se rendre à Cary A Passion for Bread: Lessons from a Master Baker—Seven Steps to Making Perfect Loaves, disponible dès le 5 novembre.
JPEG
L’adaptation à la vie aux Etats-Unis a été plutôt naturelle pour le boulanger. Son travail lui a permis de voyager à travers le monde ainsi que plus de 35 Etats. De temps en temps, sa femme et lui retrouvent leurs amis pour des repas à la bonne franquette, ou bien profitent des grands espaces américains en naviguant sur leur bateau ou en visitant les parc nationaux. Quand le temps le lui permet, Vatinet s’adonne au squash et à la randonnée, telle que celle de 26 jours sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Aujourd’hui, il est aisé de trouver plusieurs articles signés par “l’un des experts de la boulange les plus convoités d’Amérique”. En effet, Vatinet qui, a trouvé sa voie comme Maître boulanger, consultant et expert, est une fierté pour la communauté française des Etats-Unis, et en particulier, celle établie à proximité, qui peut goûter aux fruits de son succès.

Last modified on 15/11/2013

top of the page