Gwylène Gallimard, artiste de talent à Charleston, SC

Si les billets d’avion à destination de la Colombie avaient été moins chers que ceux en direction de la Caroline du Nord, l’artiste et restauratrice Gwylène Gallimard ne se serait peut-être jamais expatriée de France pour s’installer dans le sud des Etats-Unis. Une amie de l’Ecole des Beaux-arts de Nancy, où Gwylène a enseigné l’art, l’a invité à venir à Asheville, en Caroline du Nord, au milieu des années soixante-dix. Leur objectif était de passer quelques mois dans ce cadre enchanteur et de travailler ensemble sur un projet artistique. Cependant, en 1983, Gwylène a pris la décision de s’installer pour de bon Outre-atlantique, cette fois-ci à Charleston, en Caroline du Sud. Elle a non seulement été séduite par l’accueil chaleureux réservé aux artistes internationaux mais aussi par la rencontre intrigante et réconfortante entre les cultures américaine et européenne omniprésente aussi bien dans le caractère architectural de la ville que dans l’énergie qui s’en dégage.

JPEG Gwylène Gallimard est née à Paris, dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, près du siège des Editions Gallimard, la plus grande et prestigieuse maison d’édition française. Même aujourd’hui Gwylène se sent obligée de préciser son absence de parenté avec le célèbre éditeur. Porter le nom Gallimard a en effet engendré, au fil des ans, de nombreuse anecdotes : « Ma mère a rencontré Albert Camus, qui était venu à la maison présenter ses manuscrits. Comme elle était professeur de français, elle les a lus avant de les apporter à la maison d’Editions Gallimard qui était deux rues plus loin. Camus avait déposé ses manuscrits à la mauvaise ‘Maison Gallimard’ », raconte-t-elle.

Gwylène a su très tôt qu’elle voulait être artiste. Enfant, elle passait la plupart de son temps à dessiner et peindre des paysages. L’idée de vivre de son art lui est, au contraire, venue bien plus tard car sa famille décourageait fortement ce choix de carrière. Afin d’apaiser sa famille, Gwylène a choisi une carrière plus « sûre » et plus lucrative en faisant des études pour devenir neurochirurgienne. « Mon autre idée était de devenir neurochirurgienne. C’était mon rêve pour justement comprendre le fonctionnement du cerveau humain. » Plus tard, bien qu’elle ait changé de voie, c’est le même désir qui l’a conduit à poursuivre une carrière dans l’art : comprendre la nature humaine.

C’est cette recherche de la nature humaine qui a amené Gwylène à adopter le concept de « community-based art », forme d’expression artistique émanant des membres d’une communauté, et qui l’a ainsi emmené en Amérique du Nord. Sa rencontre avec Jean-Marie Mauclet, professeur de sculpture à Nancy, lui avait déjà permis d’évoluer artistiquement, passant de deux à trois dimensions. Ensuite, alors qu’elle était professeur d’art à l’Ecole des Beaux-arts de Nancy, Gwylène a obtenu une bourse du Ministère des Affaires culturelles canadien pour produire un projet plurilingue, en collaboration avec d’autres artistes, à l’Université de Concordia de Montréal. Une fois là-bas, Gwylène a suivi un master mêlant les beaux-arts et le multimédia. Son art a ainsi évolué à nouveau en incorporant à ses créations une quatrième dimension par le biais d’éléments sonores et de mouvement. Aujourd’hui, elle utilise tout type de média : de petites toiles, des films, des objets divers ou encore des mètres de corde. Le choix de son média dépend d’un grand nombre de facteurs, notamment la nature du sujet de l’œuvre, son lieu d’installation ou encore les circonstances de sa création. Dans ses œuvres, l’objectif de Gwylène n’est pas de faire « de l’art pour de l’art » mais bien de fournir au public les moyens d’entrer dans un dialogue.

JPEG Plus qu’un exercice esthétique et d’expression personnelle, la vision de Gwylène est profondément philosophique et reflète son engagement personnel dans la société et dans sa communauté. Son projet collectif le plus récent, « The Future is on the Table », illustre cette approche. Cette exposition est un projet de quatre ans à l’initiative de Gwylène et de son partenaire, Jean-Marie. Cinquante huit tabourets à trois pieds ont été produits à partir d’un morceau unique de contreplaqué, sur lequel une carte du monde a été peinte. Les tabourets ont ensuite été envoyés à des artistes et des communautés du monde entier, de l’Inde à l’Angleterre, de l’Afrique du Sud au Nigeria en passant par la France et les Etats-Unis. L’objectif de ce projet est de mettre en lumière les problèmes d’injustice sociale liés à l’eau et au logement. Ce mois-ci, les pièces du « projet-puzzle » seront rassemblées lorsque les différents artistes se réuniront à Charleston pour une série d’expositions, de conférences, et de dialogues, etc.

Gwylène et son partenaire, Jean-Michel, ont également trouvé une solution aux problèmes financiers trop souvent liés à la vie d’artiste, et ce tout en pratiquant une autre forme d’art : la gastronomie. Ils ont ainsi créé un concept de restaurant incarnant la rencontre entre les cultures française et américaine : « It’s Fast and French ». Aujourd’hui, Gwylène et Jean-Michel possèdent deux restaurants de ce type. Ces derniers offrent un cadre favorable aux rencontres fortuites et au rythme des discussions typiques des cafés français. Les tables sont ainsi placées à proximité les unes des autres, ce qui participe à l’ambiance chaleureuse. Ils ont choisi Charleston, en Caroline du Sud, pour le charme de ses petites rues, la chaleur de son centre-ville aux allures européennes et son accessibilité pour les piétons. Cette ville leur a semblé parfaite pour accueillir un restaurant qui cherche à fusionner des éléments de leur culture française d’origine et de leur région d’adoption, le Sud-est.

Dernière modification : 21/03/2011

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